11 mars. J’ai passé la journée en compagnie de mon amie Fumiko chez maître Hayakawa. Un moment rare. Au long d’une cérémonie de dégustation de kaiseki, sur le modèle d’anciennes offrandes aux dieux, chacun fut à son tour invité à partager par un petit discours les mots, les images et souvenirs que lui évoquaient les saveurs subtiles travaillées par le chef. Nulle part je n’ai vu autant de respect et de générosité, et une tradition alliant avec autant de raffinement l’admiration pour la beauté, la nature et le partage humain. Le souvenir d’un autre 11 mars était dans toutes les mémoires, bien sûr, mais il était ici accompagné d’un menu composé en hommage au printemps et à sa renaissance, autour de légumes de saison, dominé par un goût salé-amer. Il n’était pas besoin de comprendre le japonais pour percevoir l’émotion qu’exaltait ce symbole.
C’était, à soi seul, la meilleure introduction à la pensée japonaise et sa perception si particulière du temps. Quelle subtilité, qui n’exclue pas la mélancolie, ce 11 mars vécu comme un appel au renouveau. Quelle sagesse:
Le renouveau, c’est tellement plus prometteur que le nouveau. C’est tellement plus humain.